Réseau de recherche sur les politiques sociales du Nouveau-Brunswick

Stephanie Sanford


Picture1) Quel poste occupez-vous présentement et quel est votre titre officiel?

Je suis conseillère principale pour la Section de la prévention de la criminalité et des normes de police du ministère de la Sécurité publique du Nouveau-Brunswick. Je suis également chargée de cours pour le département de criminologie et de justice pénale et le département de sociologie de St. Thomas University.

2) Quelle formation avez-vous reçue?

J’ai obtenu un baccalauréat ès arts (mention très honorable en sociologie, majeure en criminologie et mineure en français) de St. Thomas University et une maîtrise ès arts en sociologie du University of New Brunswick. Ma recherche pour mon baccalauréat et pour ma thèse de maîtrise portait sur la réponse du système de justice à la violence à l’endroit des femmes.

3) Parlez-nous un peu de votre parcours professionnel. D’où vient votre passion pour la recherche ou le travail que vous faites et comment s’est-elle développée?

J’ai beaucoup de chance de pouvoir travailler dans un domaine qui me passionne autant et pour lequel j’ai étudié à l’université pendant si longtemps. J’ai commencé à m’intéresser à la police et à tout ce qui touche la justice pénale quand j’étais petite fille à Miramichi. Comme mon père était policier, j’ai grandi à l’intérieur et autour du poste de police, participant aux défilés, lavant les voitures de police, aidant à installer l’équipement radiotéléphonique et des choses du genre. Lorsque le moment est venu de fréquenter l’université, j’ai su tout de suite que je voulais étudier en criminologie et je me suis donc trouvée à St. Thomas University.

Au début des années 2000, les étudiants ne pouvaient pas avoir la criminologie comme matière principale ni se spécialiser dans cette discipline. J’ai choisi la sociologie comme autre majeure sur un coup de tête, mais j’ai très rapidement adoré cela. Mes années à St. Thomas m’ont appris à réfléchir de façon critique et m’ont motivée à contester le statu quo et à promouvoir la justice sociale. L’intérêt que j’ai pour les politiques sociales et la violence à l’endroit des femmes a réellement vu le jour dans un cours de troisième année sur la sociologie du droit, un cours que j’enseigne maintenant. Après avoir lu au sujet de l’accès des femmes à la justice, j’ai décidé d’étudier le système d’aide juridique du Nouveau-Brunswick dans le cadre de ma recherche pour ma thèse. J’ai interrogé des femmes qui avaient eu recours à l’aide juridique pour la garde et la visite d’un enfant, une séparation ou un divorce, dont bon nombre qui avaient fait l’objet de violence dans leurs relations conjugales. Quand j’ai entendu ces femmes dire qu’elles n’étaient pas admissibles aux services parce que leurs expériences n’étaient « pas assez violentes », je me suis posé des questions sur l’élaboration de ces politiques sociales et la façon dont elles peuvent paralyser davantage les citoyens les plus vulnérables.

Tenant toujours à trouver des réponses et voulant changer les choses, j’ai décidé de faire des études supérieures au University of New Brunswick. Ma thèse de maîtrise a examiné les facteurs juridiques et extrajuridiques qui influent sur la réponse de la police à la violence conjugale, y compris les politiques, les procédures et les lois qui régissent les mesures policières. J’ai découvert que, malgré les politiques et les procédures, la formation des policiers relative à la violence conjugale, leur connaissance du sujet, leurs attitudes et points de vue individuels sur le mariage et la famille, de même que leur perception du travail policier entrent aussi en ligne de compte.

Après avoir terminé ma maîtrise, j’ai enseigné à temps plein à St. Thomas pendant un an. J’adorais enseigner (et j’adore toujours ça!), mais j’ai décidé de saisir l’occasion de travailler dans le domaine des politiques un an plus tard lorsqu’un poste est devenu disponible au ministère de la Sécurité publique.

4) Parlez-nous d’un ou deux de vos projets actuels.

Depuis les dernières années au ministère de la Sécurité publique, je m’occupe de la priorité de la Stratégie de prévention et de réduction de la criminalité du Nouveau-Brunswick qui porte sur la violence conjugale ou entre partenaires intimes. Cette stratégie a été élaborée en collaboration avec la Table ronde sur la criminalité et la sécurité publique, une organisation qui réunit des organismes communautaires, la police, le secteur privé, les universités, des groupes des Premières Nations, les administrations municipales et fédérales et plusieurs ministères provinciaux pour collaborer à l’amélioration de la politique et de la pratique en matière de prévention de la criminalité. L’une des activités stratégiques consistait à mettre en œuvre un outil normalisé d’évaluation des risques qui serait utilisé par tous les policiers de la province dans les cas de violence conjugale ou entre partenaires intimes. Notre équipe de 32 formateurs a offert la formation relative à la violence conjugale ou entre partenaires intimes et à l’Évaluation du risque de violence familiale en Ontario (ODARA) à plus de 800 policiers (services de police municipaux et GRC). Parce que les résultats de l’ODARA sont censés être utilisés pour éclairer les décisions relatives à la liberté sous caution, j’ai aussi offert des séances d’information aux procureurs de la Couronne partout au Nouveau-Brunswick, de même qu’à l’Association des juges de la cour provinciale du Nouveau-Brunswick.

Je travaille actuellement avec une équipe multidisciplinaire pour élaborer un modèle d’intervention communautaire coordonnée pour les cas de violence entre partenaires intimes qui présentent un risque élevé et un grand danger. Selon ce modèle, lorsque les policiers, les coordonnateurs des services aux victimes ou d’autres fournisseurs de services utilisent un outil pour évaluer le risque ou le danger et que les résultats indiquent un risque élevé ou un grand danger, le cas peut être envoyé à une équipe de coordination des cas qui travaillera ensemble pour protéger les personnes. L’objectif de ce modèle est d’améliorer les interventions de la collectivité et du système de justice dans les cas de violence conjugale ou entre partenaires intimes qui présentent un risque élevé ou un grand danger en améliorant l’échange de renseignements, la planification concertée de la sécurité et les stratégies pour atténuer les risques.

La campagne L’amour ne devrait pas blesser, lancée récemment par la Table ronde, est une autre activité de la stratégie contre la violence conjugale ou entre partenaires intimes. Grâce au marketing social et traditionnel, la campagne accroîtra la sensibilisation du public et ses connaissances en matière de violence conjugale ou entre partenaires intimes dans le but de créer un environnement social qui favorise et encourage le changement de comportement. La campagne mettra également une variété de services de soutien à la disposition des victimes et des partenaires violents.

5) Comment vos recherches ou votre travail peuvent-ils contribuer, selon vous, à l’élaboration de politiques publiques fondées sur des données probantes?

La prise de décisions éclairées est l’un des principes directeurs de la stratégie de prévention de la criminalité. Notre mission est de mettre en œuvre une stratégie globale fondée sur des pratiques éprouvées grâce à la planification, à l’éducation, à la coordination, au leadership innovateur et à l’évaluation. Compte tenu de notre réalité financière, nous savons que les décisions concernant l’utilisation des ressources doivent être guidées par une utilisation efficace des données, y compris les connaissances sur « ce qui fonctionne » pour prévenir et réduire la criminalité et la mesure dans laquelle les approches actuelles donnent les résultats voulus. Toutes les activités prévues par la stratégie sont fondées sur des données probantes. Si les données probantes sur le Nouveau-Brunswick ne sont pas disponibles, nous travaillons avec nos partenaires pour mettre en œuvre des moyens d’obtenir de meilleures données. Les codes d’un sondage sur la violence conjugale ou entre partenaires intimes, par exemple, ont été ajoutés à tous les systèmes de gestion des dossiers de police de la province. Nous connaissons donc, par région, le nombre d’incidents de violence conjugale ou entre partenaires intimes traités par la police, la proportion pour lesquels un score ODARA a été produit et le nombre pour lesquels les scores ODARA se trouvaient dans la catégorie des risques faibles, modérés et élevés. Ces données aideront à orienter le modèle d’intervention communautaire coordonnée.

6) Décrivez-nous certaines de vos réalisations passées qui ont été importantes dans votre cheminement professionnel. Ont-elles contribué à promouvoir des politiques publiques fondées sur des données probantes?

J’ai l’impression que le fait d’avoir fait ma maîtrise et de continuer à enseigner à temps partiel a été important pour mon parcours professionnel. Comme étudiante de cycle supérieur, j’ai établi des relations avec plusieurs professeurs dévoués, passionnés et incroyablement brillants. Je fais toujours appel à ces mentors pour obtenir des conseils spécialisés sur des questions tant personnelles que professionnelles. Le maintien de ces relations me permet de mieux faire mon travail, car ils me tiennent au courant des dernières recherches et des politiques publiques d’autres gouvernements.

7) Décrivez en quelques phrases comment vous avez participé aux activités du RRPSNB et comment votre relation avec le Réseau a contribué à votre travail ou à vos recherches et/ou aux politiques sociales/économiques?

Je suis membre du RRPSNB depuis le tout début. Le RRPSNB est un important partenaire de la Table ronde sur la criminalité et la sécurité publique. Il a été dit que le succès de la Stratégie de prévention et de réduction de la criminalité du Nouveau-Brunswick découle de la collaboration de divers secteurs – l’université, la collectivité et le gouvernement – qui ont uni leurs efforts pour réaliser des objectifs clairement définis et mesurables. Le RRPSNB a préparé ces secteurs à mieux travailler ensemble, et, pour cette raison, le Nouveau-Brunswick est très chanceux.

8) Auriez-vous quelque chose à ajouter, un mot de la fin?

Je suis la très fière maman de deux jeunes enfants (montrés dans la photo). Ma fille, Jorja (6 ans) veut être enseignante quand elle sera grande, et mon fils, Jackson (4 ans) veut être policier. Je sais qu’ils ont bien le temps de changer d’idée, mais j’espère qu’ils auront un jour une carrière dont ils seront fiers et qu’ils trouveront énormément enrichissante.


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